Peut-être que l'humain se coupe du divin à mesure qu'il
surpasse le rythme de la nature. J'ai dormi en tente, en forêt. Le soir venu,
je ne pouvais qu'accepter l'absence de lumière avec tous les animaux
m'entourant, exception faite des rares nocturnes dont on aperçoit surtout le
silence. Aux aurores, je me réveillai en même temps que les oiseaux, les mammifères, la terre grouillante. Par ce
simple retour à une vivance sauvage et pourtant harmonisée au gré de
millénaire d'adaptation, cette cadence générale où finalement la perturbation
humaine reste minuscule, mes sens s'aguerrirent de jour en jour. Je ne
pouvais plus seulement voir ou entendre, mais la sensation des choses en moi
devint de plus en plus physiquement perceptible. Je sentais les éléments
s'immiscer dans mes cellules, aussi vrai que l'on sent l'eau d'une rivière nous
emporter dans son courant. Le jour et la nuit sur terre sont une décision
cosmique, les planètes les organisent à leur guise, et nous faisons partie de
ce tout, à moins d'inventer le confort de l'électricité. Dès lors, nous ne
vivons plus au rythme d'un ensemble sacré. Nous nous émancipons de l'ensemble
et de sa magie au profit d'une idée du confort, une idée de la liberté qui
somme toute est un tissu de désir toujours grandissant. Il y a une autre magie
dans ce fait, mais elle me semble lutter contre notre conscience d'un ensemble plus ancien duquel, par ce tout petit changement de rythme, nous nous éloignons. Dès lors,
lorsque nous observons cet ensemble par hasard ou par ennuie, il nous semble
soudainement moins désirable. Alors nous pouvons nous élargir en éloge à son égard sans que nos actes ne suivent nécessairement nos mots. Cette profonde compréhension
qui n'avait rien à voir avec les mots dépérit en même temps que nous nous
attribuons la science des choses et que nous nous positionnons en acte tout en
haut de l'échelle du vivant.
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