mercredi 24 février 2016

"
"Mademoiselle C., quatre ans, célibataire": le notaire a lu cette phrase comme toutes celles qui la précédaient, sur un ton morne, sans éclairer sa voix par un sourire, insensible à cette fantaisie nichée dans l'arbre creux du langage administratif. Il était atteint par la maladie propre à ceux qui se confondent avec la place qu'ils tiennent dans la société: le sérieux fige leurs traits, la raideur gagne leur corps puis leur âme, ils sont devenus leur propre statue et plus rien ne les fera descendre de leur socle que leur mort.
"
Christian Bobin

lundi 22 février 2016

Je lis les mots des autres pour me laver de ceux, captifs, qui me serrent le ventre, m’empêchent de contempler. Je lis pour l'éveil, mais l'éveil se produit quand je relève la tête, lorsque des mots n'existent plus et qu'une emprunte discrète ouvre tous mes sens. C'est sans le vouloir, dans ce silence médian, que naît l'espace d'une compréhension. Les mots servent alors de témoins pour l'invisible, une entité insaisissable qui nous transperce tout le temps. Ils offrent à l'imaginaire un peu de ciel, attendrissant le regard que l'on porte sur les choses. Alors s'enclenche le cycle d'une nouvelle compréhension, d'une nouvelle rencontre avec le fond de moi même, là où, épargné d'un Moi illusoire et plein d'orgueil, l'image du monde demeure intacte.

dimanche 21 février 2016

Je te souhaite un jour de te sentir seul au point de te satisfaire de toutes les présences, fût ce celle d'une poule. Lorsque celle ci réagira à ton passage, admettant que tu existes, tu entendras peut être un écho. Ce jour là, tu ne limiteras plus l'individu à l'humain mais la définiras par cette présence qui est un acte.

Sur l'eau, on peux observer des oiseaux jouer, tourner en rond, chercher l'attention de leurs congénères, et tu saisiras peut être qu'il ne s'agissait pas seulement d'un réflexe de survie que l'orgueil humain aime différencier des siens, mais que peu de vivants se complaisent dans l'isolement.

Ce jour de grande solitude, ta vision de l'autre sera bouleversée. Tu n'aimeras plus seulement te pavaner avec des certitudes et tu tiendras ton silence pour qu'il contemple sans plus blesser une parole qui lui échappe, ce savoir qui précède toute pensée: La présence est un acte. Tu ne penseras plus à l'humilité quand tu te tairas au point de descendre plus au fond de toi: l'image limpide du monde s'y reflète. Tu t'assiéras dans l'éternité du présent, presque dans la paix d'un dieu.

Car si naît en toi la conscience la plus difficile, alors tu agiras aisément sur le plus simple. L'on te critiquera toujours car c'est une habitude, et tu sauras te démarquer des reproches. Mais il te restera encore le challenge le plus grand de tous: tolérer leur ignorance.

Quand tu seras seul au point de protéger l'arbre et la fourmis, tu comprendras tout en même temps l'amour, l'harmonie, le courage, la responsabilité... Tu saisiras peut être que tous tes actes proviennent d'un pouvoir, d'un don merveilleux et terrible, le plus influent que la nature ait prodigué à des animaux : L'humain peut tout détruire. L'humain peut protéger.

La présence est un acte de vie. Protéger cet acte envers et contre toutes les ignorances est la plus belle des reconnaissances. L'empathie n'est jamais une erreur.

jeudi 18 février 2016

Harmonie et chaos

La totale lumière annihilerait toutes les nécessités. C'est pour cela que tout est périssable. La nécessité à toujours été le sens de la vie. L'instinct de survie, le désir sexuel, l'amour... tous témoignent de pulsion de vie et de mort. Les voies de création et de destruction se font sans cesse écho. La matière se charge de ce que nous n'osons appréhender. En philosophie, nécessaire signifie: inévitable. 

Le socle de toute chose est le mystère, la cause de toute chose est son questionnement. Le doute, la peur, intimement lié à leur contraire, font partie intégrante de notre "liberté". Elles en sont la condition sine qua non et lui donne toute sa profondeur. L'infini qui nous échappe est la vie même, son mouvement fondamental. Les croyances les plus contradictoires ont toutes chances d'y trouver refuge. Le jugement n'est qu'un consensus et le savoir est minuscule. L'esprit est trop codé, trop structuré. Le mental tire des conclusions car il est une conséquence, mais l'âme est le mystère. L'esprit devient pont fragile lorsqu'il voue son énergie à plus que lui même, lorsqu'il reconnait son énergie comme étant au delà de lui même, abandonnant tout désir d'accaparement: s'abandonner. L’inflexion de l'abandon brise une à une les parcelles du pont qui surplombe le gouffre du mystère.

Il y a des doutes finit, terrestres, palpables, rapidement résolubles. Il y en a d'autre, si l'on croit les avoir élucidé, c'est que l'on ment. Résoudre n'est pas le nom de la vie mais celui du désir. Le nom de la vie est mystère.
Rien n'est grave si on a vécu avec passion! Le drame c'est de s'être résigner à vivre sans prendre aucun risque, de n'avoir jamais pu dire à la vie, c'est le bordel ici, mais vivre est grandiose, et avant de mourir je veux te le rendre en libérant l'amour pour qu'il déborde de partout comme j'aime qu'il déborde de moi. Ce n'est pas par devoir, je le ferais avec plaisir car la vie est une putain de merveille.

Tout est merveilleux. Ça demande un vrai effort de déconditionnement pour s'en apercevoir. Tout est merveilleux. Même les "erreurs" entraîne la vie, une suite de réactions transitoires, d'interactions perpétuelles. Tout disparaîtra, tout transformera. Vive la vie, vive la mort, si tu aimes!

jeudi 11 février 2016

Fervent déterminisme

Je rêve d'un monde ou les coupables sont réparables,
On a tous été victime de quelque chose
Personne ne vient au monde avec la connaissance d'un crime. Ce sont les averses qui entraînent le déluge

Sartre disait :
“L’homme qui se croit déterminé se masque sa responsabilité”

Conclusion simpliste d'un grand penseur. Imaginons que le déterminisme est une réalité. Accepter la réalité serait un acte mature, responsable dirait on, non? Le déterminisme dérange l'humain dans ses critères de réussite ou d'échec qui n'appartiendraient qu'à lui même. Mais nous sommes le résultat de tous les facteurs du monde. Nous faisons partie d'un tout, et nous pouvons très bien l'envisager tout en continuant à agir en conscience. Peut être même davantage... Dans tous les cas, déterminisme ou non, l'on peut toujours se trouver des raisons de se sentir responsable ou non. La réalité du déterminisme ne change rien à ça, il s'agit juste d'un argument de plus.

Avec le déterminisme, rien n'est absolu, si ce n'est l'ensemble à qui tout appartient, et c'est bien mieux comme ça. Ciao culpabilité excessive, sentiment de mérite, compétitivité. Bonjour harmonisation. Cette phrase d'un penseur tel que Sartre prouve à quel point l'égo blessé de l'individu n'est pas prêt à sa divinité qui l'englobe et le dépasse. Je me crois déterminé et l'accepte sans jamais me désister de mon pouvoir de décision, quand bien même toutes mes décisions seraient déterminé. L'un empêche pas l'autre. Savoir que tout est déterminé me permet de mieux comprendre les principes d’interactions et de guérir de mes blessures sans chercher à me flageller. Savoir que tout est déterminé ne m'empêche pas de me sentir responsable, même si dans l'absolue la responsabilité n'existe donc plus. Mon pouvoir est déterminé, mais n'en demeure pas moins grand.

J'imagine qu'accepter cela demande un petit cheminement, de faire le deuil de certaines croyances et de faire la paix avec notre inéluctable vulnérabilité. Il faut revoir nos critères et assouplir notre égo. Quand je vois la proportion de peur mué en orgueil chez certains, je comprends que l'idée d'être lié à tout puisse être un risque pour leur petite personne. Le racisme est un bon exemple. La peur qui ne se surmonte pas, la peur qui se complait, la peur qui se déguise et se trouve des arguments, est un étau pour la pensée.

Spinoza disait:
“Les hommes se trompent quand ils se croient libres ; cette opinion consiste en cela seul qu’ils sont conscients de leurs actions et ignorants des causes par lesquelles ils sont déterminés”

Ce constat est trop péremptoire à mon goût. Si j'émets une note de musique, c'est moi, l'instrument et la forme de la pièce ou elle résonnera qui l'auront déterminé, et pourtant, elle existera par elle même. Une fois émise, je ne pourrais pas la stopper. Sa forme prendra son essors en nous mais se dispersera par elle même. Elle était attendu mais dorénavant, elle vibre. Il en est de même avec toute conséquence. Il en est de même avec des êtres vivants. Notre vécu est déterminé mais n'en reste pas moins complexe, intense et singulier. Le concept de liberté est à revoir. Comme celui de la responsabilité, il n'est certes pas absolue, mais simplement parce que rien ne peut l'être, et c'est idiot de ne pouvoir faire le deuil d'une croyance erroné simplement parce que nous voudrions être des dieux indépendants. Nous avons inventé des concepts qui n'ont aucune existence absolue.

dimanche 7 février 2016

Quelle est la pire des violences ? Celle qu'on banalise... La violence faite aux animaux est la plus banalisée du monde. Je ferais tout pour qu'on le sache.